"Avec l'enfance, dit Colette, on perd le don d'inventer." Si l'invention consiste, en effet, à grandir la vérité à la dimension du rêve, alors, soit. Nous en eûmes la preuve en visitant la maison natale de la romancière. Pénétrer dans la "Maison de Claudine", quel choc pour un amoureux de Colette, qui reconnaît tout sans avoir jamais rien vu ! (...)
Au long d'une existence agitée, chaque fois que Colette a voulu évoquer une fleur, un paysage, un fruit, la bise d'hiver, un printemps débarqué sans crier gare, elle s'est instinctivement référée à ses souvenirs d'adolescente. Elle qui rêvait, au moment de tout finir, d'emporter une gorgée imaginaire d'une source de son enfance, qui, jaillie au ras du sol, empruntait une saveur sauvage aux feuilles et aux racines d'alentour - elle a connu ce que nous n'exprimons guère ou mal : le prix de joyau d'un souvenir que nos premières années embellissent et qui tient bon, en diamant qu'il est, jusqu'à la fin. (...)
Ombrageux, possessif et tendre, Saint-Sauveur a la claire conscience d'avoir été le berceau d'une souveraine."
Un texte écrit par Clarendon
(Bernard Gavoty) en 1972...